Chasse aux collabos ...
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la chasse aux collabos en 1944
miliciens français
la liberation en 1944
Les soldats américains, les Tommies anglais regardent d'un air étonné ou scandalisé ces femmes, la tête et le sexe tondus, que l'on promène par les rues, encadrées de mitraillettes vindicatives, ces hommes qui, le cou pris dans le carcan d'un portrait du Führer, sont hués par la foule; ils assistent au sac des maisons habitées par les collabos; ils feignent de ne pas entendre le claquement des détonations annonçant, ici ou là, quelque exécution sommaire. Ils interviennent parfois, mais ce n'est pas leur rôle, c'est celui de la nouvelle administration gaulliste. Et puis, toujours à la poursuite des Allemands, leur passage dans les régions libérées est si bref I
Dans les villes, l'oppression de quatre années d'occupation, les privations endurées, la peur trouvent tout à coup leur exutoire dans l'explosion de la vindicte populaire. Château-Gontier, qui a connu, la veille même de sa libération, des heures affreuses marquées par l'exécution de sept Français ( otages et résistants) fusillés dans la cour du collège à l'aube du 6 août, voit s'organiser, dès le lendemain, une active chasse aux collaborateurs. Comme le rapporte Marc Vallée :
« Plusieurs ont réussi à se cacher ou à s'enfuir. Les autres sont arrêtés à leur domicile ou dans les endroits les plus divers où ils ont vainement essayé de se dissimuler. Sous la menace de mitraillettes, par les rues de la ville, ils sont emmenés et emprisonnés... » D'autres, « attachés et en cortège, sont conduits jusqu'au lieu de la tuerie. Là, ils sont obligés d'enlever, poignée par poignée, la terre fraîche jusqu'à ce que soient mis à jour les sept cadavres ».
Ailleurs, quelques femmes ou jeunes filles dont la conduite fut légère avec les Allemands sont fort cruellement tondues à ras sur la place publique et leurs chevelures, ô dérision, accrochées à leurs portes ».
Dans toutes les villes de France libérées, grandes ou petites. les mêmes scènes se reproduisent à quelques variantes près : parfois on ajoute à l'humiliation des femmes tondues en leur tatouant des croix gammées sur la peau.
Dans le Midi, les heures de la libération seront parfois atroces. A Nîmes, un pauvre minus qui a revêtu l'uniforme de la Milice est pris à partie par la foule et lynché; à Montpellier, les mères de famille emmènent leurs enfants sages voir fusiller les miliciens.
Ceux-ci sont férocement traqués à travers tout le territoire : il est vrai que leur participation active à la tragique bataille du Vercors, livrée par 20 000 Allemands contre 3 500 maquisards, du 13 juin au 23 juillet 1944, a soulevé une profonde émotion dans toute la France; le rôle des miliciens, particulièrement odieux, a consisté à se faire passer pour une unité F.F.I., révélant ainsi des positions tenues par des résistants qui furent tous exterminés.
Il est vrai aussi que la vengeance n'atteint pas toujours les seuls responsables : au Grand-Bornand, siège de l'école des cadres de la Milice, où des dizaines de miliciens sont fusillés, il y a parmi eux de tout jeunes gens, presque des enfants, de quinze à seize ans; on leur promet la vie sauve s'ils renient leur uniforme. Les malheureux ont le triste courage de refuser et de tomber en criant : Vive la France I
On ne tue pas que des miliciens. Il n'y a pas que la couleur de l'uniforme qui soit criminelle, il y a aussi celle de la peau : les gitans et autres romanichels ont, dans les maquis, la fâcheuse réputation d'être des indicateurs. Malheur aux roulottes I Les tziganes, capturés, sont emmenés pour une « corvée de bois » et abattus en cours de route.
Mais il y a aussi l'anonyme troupeau des civils innocents tués par un cruel destin : destin du châtelain jalousé, tels dans le Sud-Ouest M. de L... qui fut lardé de coups de couteau, arrosé d'essence et brûlé, ou le baron Reille-Soult, froidement tué à Montmorillon tandis que son château est pillé; et pourtant il avait fait du renseignement au profit des Anglais.
Destin de l'ancien combattant, fervent pétainiste, du médecin dévoué pour qui les partis n'existent pas, destin du chef d'entreprise payant de sa vie la mise à la disposition de l'Allemand de ses usines ou ateliers. Mais on meurt encore pour moins que cela : d'une imprudence verbale, d'un rendez-vous pris avec un collaborateur notoire, d'une rencontre fortuite avec l'occupant et pour des motifs n'ayant rien à voir avec la guerre.
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